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La ferme des 1000 saumons

La ferme des mille vaches, la ferme des mille veaux, la ferme des mille saumons, présentent de nombreux points communs. Le concept est identique: un seul facteur importe, le retour sur investissement.

L’environnement, le bien-être animal, la sécurité alimentaire sont des concepts qui figurent uniquement sur les documents d’incidence des dossiers investisseurs, quand il s’agit d’obtenir des autorisations et/ou des subventions.

Le comble du cynisme, pour cet élevage intensif de saumons (voir ci-dessous), ce serait l’obtention du label bio. Nous avons déjà alerté et fait part de notre totale défiance vis-à-vis des labels. Le discrédit se confirme.

Comment ne pas dénoncer cet oxymore? Associer « bio » et « production importante » n’est rien d’autre qu’une production industrielle, où le saumon est nourri avec du granulé sans traçabilité et où les antibiotiques restent autorisés. 

Puisque les contraintes administratives et environnementales pèsent de plus en plus sur les élevages continentaux, le CEDEPA préconise:

« un élevage sur une grande arche de Noé :1000 vaches,1000 veaux,1000 porcs et 1000 saumons sur une grande barge. Un pipeline sec pour un granulé polyvalent -assaisonné à un cocktail chimique pour la prévention des pathologies- et un autre pipeline pour l’alimentation en eau douce ».

Productions certifiées durables puisque nos cours d’eau ne seraient plus pollués par ce type d’élevage. [Ne souriez pas, c’est déjà le cas de l’aquaculture en cages offshore].

@Ocean Farm Technologies
@Ocean Farm Technologies

Ce schéma prémonitoire, ouvre la perspective des productions innovantes durables.

 

nous reproduisons in extenso cet article ci-dessous:   « Mégaferme de saumon bio en Irlande : catastrophe écolo en vue

Publié le 24/01/2015 par Diane Berbain
…La baie de Galway, site Natura 2000 en Irlande, va accueillir un gros élevage saumons avec l’approbation du gouvernement irlandais. 75% de la production d’élevage dans ce pays est sous le contrôle de la multinationale norvégienne Marine Harvest. Il y a de grandes chances pour que ce saumon soit vendu sous le « label rouge » et la certification « Agriculture biologique ».

Le saumon bio, c’est du bluff

Le label bio est censé rassurer le consommateur averti, lui garantissant d’acheter un produit dont la production a un impact minime sur l’environnement et la santé, dont l’usage de produits chimiques synthétiques est banni, et un bétail nourri avec une alimentation à son tour 100% bio.

Malheureusement, dans le cas du saumon d’élevage bio, cette garantie n’existe pas. Le label bio autorise le confinement en cage. Il n’empêche pas les inconvénients de l’élevage en cage ouverte, et masque au contraire une myriade d’impacts négatifs sur l’environnement et la santé, autorisant l’usage de produits chimiques pour lutter contre différents parasites et maladies.

01Sur l’île irlandaise d’Inis Oírr, dans la baie de Galway (DianeBerbain)

Beaucoup d’Irlandais sont contre l’expansion de cette industrie autour de leurs côtes. Ils sont alarmés car le pays a décidé de miser gros sur l’aquaculture, avec le soutien de l’Union européenne. L’Irlande souhaite atteindre des revenus liés à l’industrie des produits de la mer pour une somme d’au moins 1 milliard d’euros, créer 3 000 emplois et faire croître l’aquaculture de 78%, en agrandissant les fermes déjà existantes.

Un projet de ferme monstre

L’installation d’une ferme de saumon bio gérée par Marine Harvest pouvant produire 15 000 tonnes de poisson par an est aussi prévue. Ce serait la plus grosse ferme au monde.

Avec 456 hectares, cette ferme serait un monstre dans la baie de Galway. Son industrie renommée de fruits de mer pourrait être mise en péril à cause de ces installations. La surcharge en nutriments présente dans les déchets rejetés directement dans la mer pourrait aussi causer la prolifération nocive d’algues, empoisonnant les fruits de mer.

L’Irlande est un pays qui cherche à sortir de la crise, mais est-ce la bonne méthode?

J’étais à Galway il y a quelques mois pour prendre la température. Et la chanson était la même qu’en Norvège.

Comme en Norvège, les Irlandais récoltent les richesses venant de la mer depuis des siècles, et c’est sans doute leur ressource la plus importante.

02Petit village dans le Connemara, à l’écosystème menacé (Diane Berbain)

Comme en Norvège, on y lit la même détresse chez les activistes, on y rencontre des gens inquiets pour l’environnement, des pêcheurs qui ont peur pour leurs souches de poissons sauvages.

Comme en Norvège, le gouvernement se soumet à la volonté des multinationales.

Comme en Norvège, l’industrie salmonicole fait pression pour augmenter la production, aux dépens des risques que cela implique pour la santé publique et l’environnement.

Comme en Norvège, le saumon sauvage, qui fraie dans les rivières, devra, pour aller en mer, nager dans des eaux remplies de saumon d’élevage, des eaux infestées par le pou du saumon.

Problème environnemental et démocratique

Comme en Norvège, cela risque de devenir non seulement un problème environnemental, mais aussi un problème démocratique, quand une industrie tient les rênes.

Comme en Norvège, Marine Harvest engranger tous les bénéfices sans rien laisser à la communauté locale en contrepartie de l’utilisation de la baie.

En Norvège, l’élevage de saumon rejette chaque année des déchetséquivalents aux égouts produits par 11,9 millions de personnes, soit la population de Tokyo. Le tout non traité, et se déversant directement dans les fjords et tout le long de la côte norvégienne. Rien n’est prévu non plus pour gérer cela en Irlande.

Comme en Norvège, le principe de précaution est mis sur la touche, au lieu d’entamer immédiatement une transition soutenable en cages fermées.

03Manifestation à Galway contre le saumon d’élevage, en 2013 (StColmans Anglers)

Billy Smith, charpentier à la retraite, est le premier activiste que je rencontre à Galway. Il est l’un des fondateurs du groupe Galway Bay Against Salmon Cages, qui existe depuis 2012, et rassemble entre autres des pêcheurs de la région, des ONG :

« Neuf autres fermes sont proposées pour l’ouest de l’Irlande. On dit de la baie de Galway qu’elle est protégée des tempêtes, mais les terribles rafales de l’hiver 2013 nous ont prouvé le contraire. Le 1er février 2014, des milliers de saumons se sont également échappés de la ferme dans la baie de Bantry. »

Eoin Trill, guide-pêcheur, me parle aussi de son engagement contre les projets de ferme à Galway :

« Je suis totalement contre l’élevage actuel, mais pas contre les emplois. Et une chose est sûre, ce sont les cages fermées qui sont le futur.

Les fonds marins sous les fermes déjà établies sont dans un état épouvantable, les fruits de mer sont détruits, la biodiversité est sacrifiée. Les invertébrés sont aussi touchés. »

Il faut que cela cesse 

Il pointe du doigt un autre problème : « Si le poisson s’échappe, il remonte les rivières, se croise avec les souches de saumon locales, ce qui affaiblit leur patrimoine génétique et transmet les maladies. »

04Eoin Trill montre l’emplacement prévisionnel de la future mégaferme de Marine Harvest (Diane Berbain)

Selon lui, « les compagnies norvégiennes Cermaq et Marine Harvest sont les plus gros pollueurs au monde ».

« J’ai toujours su à quel point l’élevage de saumon de ce type était néfaste, je l’ai su toute ma vie. Leur unique priorité est de faire de l’argent. Marine Harvest doit être stoppé pour que l’océan soit sauvé. Il faut que l’élevage de saumon soit transféré dans des cages fermées. Il faut que cela cesse. »

Les souches de truites de mer avaient déjà été quasi décimées dans les années 80 dans le Connemara, à cause de poux de mer qui avaient tout envahi après l’installation de fermes aquacoles (elles avaient ensuite été démantelées).

05Des fermes aquacoles au large du Connemara (Diane Berbain)

Ça détruira tout l’écosystème 

Le mouvement de protestation local contre l’établissement de la mégaferme dans la baie de Galway s’étend jusqu’aux îles d’Aran.

« Ces élevages polluent. La plupart des gens de l’île sont contre. Il s’agira de la plus grosse ferme bio au monde. Et si cela se fait, tout disparaîtra. Ça détruira tout l’écosystème, et ça ne fera qu’empirer d’année en année.

Les éleveurs de saumon ont tellement de pouvoir sur les politiciens et les médias, qu’il faut se baser sur le bon sens.

Les Irlandais ne savent pas à quel point ce projet est mauvais. Le gouvernement prétend que c’est le seul moyen de créer des emplois. C’est juste du marketing. »

06Rory Folan, pêcheur d’Inis Oirr (Diane Berbain)

Les autorités irlandaises prétendent qu’il n’y a pas de contraintes environnementales majeures pouvant empêcher d’accorder une licence de pisciculture sur les sites désignés.

 

Chers consommateurs français, pour sauver les ressources du Connemara et la baie de Galway, pour sauver les côtes norvégiennes, réfléchissez avant de mettre du saumon dans votre assiette ! »

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