Il faudra peut-être sortir un jour des contradictions qui caractérisent les certitudes pétries d’incohérences du 21ème siècle. Chaque clan a ses convictions au prisme du seul sujet qui le préoccupe :
– La LPO (qui réalise par ailleurs un travail remarquable) ne regarde pas le cormoran comme « destructeur de poissons migrateurs en grand déclin » : seul le cormoran lui importe,
– La FNPF qui vénère le silure n’est pas considérée en infraction par le Code de l’environnement au titre de la destruction d’espèces migratrices (prédation naturelle) comme le serait l’homme sanctionné d’une amende de milliers d’euros assortie de sanction pénale, pour « destruction de frayères potentielles », (précision: d’une part, le prédateur est allochtone. D’autre part, les sanctions infligées au titre du Code de l’environnement nous semblent superfétatoires -mais légales- eu égard aux impacts réels du silure sur les peuplements piscicoles).
– FNE avec la seule lorgnette du milieu dulçaquicole, stigmatise les ouvrages hydrauliques prétendument responsables du déclin des poissons migrateurs… pourtant décimés en mer (où ils passent leur vie) par la surpêche, le braconnage et privés de nourriture par le réchauffement climatique (baisse de 80% des stocks de krill).
L’anthropisation et la pollution des écosystèmes engendrent des préjudices socio-économiques. Dans les eaux closes, survit encore pour combien de temps, une espèce en voie d’extinction : le pisciculteur.
Nonobstant une balance commerciale déficitaire et les belles intentions politiques (qui s’arrêtent à la fin du discours) nous n’observons aucun indice pour encourager cette filière ignorée, pourtant d’intérêt général en termes de souveraineté alimentaire. On importe des produits aquatiques sans traçabilité, qui ont parcouru plus de 5000 km.
Comme rien n’est fait pour changer la courbe de ce déclin durable, le déclic pourrait venir un jour du consommateur ?
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un cormoran doit dévorer pas loin de 200kg/an. Imaginez la prédation d’une colonie complète. En général, il y a un bon indicateur visuel: quand il n’y a pas de cormoran sur un étang, c’est qu’il n’y a plus de poisson.
La suspension de la chasse aux grands cormorans inquiète les pêcheurs et les pisciculteurs
La Ligue de protection des oiseaux de Loire-Atlantique a obtenu la suspension de la chasse aux grands cormorans. Les pêcheurs et les pisciculteurs s’inquiètent de voir ces oiseaux dévorer encore un peu plus leurs poissons.
Les pêcheurs et les pisciculteurs de Loire-Atlantique sont très inquiets à cause des grands cormorans. Ou plutôt, à cause de la décision de justice qui suspend la chasse de ces oiseaux qui dévorent les poissons dans les lacs et les étangs.
La préfecture a autorisé l’abattage de 4.800 cormorans sur trois ans alors qu’il y en a entre 3.000 et 3.200 en Loire-Atlantique
Pendant une quinzaine d’années, la préfecture a autorisé l’abattage des grands cormorans pour protéger ces activités économiques, sans que ça pose problème. Elle a encore délivré une dérogation l’an dernier, pour abattre 1.600 cormorans par an pendant trois ans, de 2016 à 2019. Et là, c’est devenu beaucoup trop pour la Ligue de protection des oiseaux qui a saisi la justice. « Sur trois ans, ça fait 4.800 cormorans autorisés au tir, en sachant qu’il y a 3.000 à 3.200 cormorans en Loire-Atlantique », explique Guy Boulès, le président de la LPO 44. Deuxième problème pour lui : des contrôles insuffisants de l’abattage de ces oiseaux qui sont protégés.
« À cause du cormoran, notre production de poisson a diminué de moitié dans certains étangs ».
Des oiseaux qui posent de sérieux problèmes à Philippe Rélot. Il est pisciculteur à Missillac, tout au nord de la Loire-Atlantique. « On a commencé notre activité en 1988 et, à l’époque, les cormorans on ne connaissait quasiment pas. On avait des rendements dans nos étangs de l’ordre de 300 kilos de poissons par hectare et par an. Maintenant, dans ces mêmes étangs, on est en-dessous des 100 kilos, avec les mêmes techniques de production ancestrales. Ce n’est pas compliqué de comprendre que c’est lié, en très grande partie, au cormoran. Un seul oiseau mange 500 grammes de poisson par jour. Imaginez quand il y en a 50 qui arrivent sur un étang ! On a même des étangs dans lesquels on a arrêté l’élevage puisqu’on arrivait même pas à récupérer la quantité de poissons qu’on y avait mis ». Et ça, poursuit-il, « c’est sans compter les pertes induites par les blessures et les maladies ». Il estime que le cormoran lui fait perdre 25% de chiffre d’affaires par an.
L’abattage des grands cormorans aussi suspendu dans le Var et dans les Vosges.
Alors, comme les autres pisciculteurs et les pêcheurs professionnels, il a bien du mal à admettre l’action en justice de la LPO et la décision du tribunal. « Ces tirs, c’est pour protéger nos poissons. On ne comprendrait pas qu’un berger ne puisse pas protéger ses brebis contre les loups ». Ce qu’il craint, c’est que beaucoup de pisciculteurs finissent par abandonner le métier s’ils ne peuvent plus en vivre et les étangs qu’ils utilisent. « Si plus personne ne s’en occupe, c’est toute la biodiversité qui risque d’en pâtir ». Et ce qui l’agace d’autant plus, c’est qu’il y a un gros potentiel de développement de la pisciculture en France, notamment pour répondre à la demande de poisson pour les plats cuisinés.
Il n’y a pas qu’en Loire-Atlantique que la justice a décidé de suspendre l’abattage des grands cormorans. C’est le cas aussi dans le Var et dans les Vosges.
Par Marion Fersing ; France Bleu Loire Océan Mercredi 11 octobre 2017