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La continuité écologique des cours d’eau

    Nous souhaitonsune autre lecture en 2014 avant l’échec du « bon état 2015 ».

    La directive-cadre sur l’eau (2000/60/CE), couramment désignée DCE, est une directive européenne prise le 23 octobre 2000. L’objectif est de prévenir et de réduire la pollution des eaux, de promouvoir son utilisation durable, de protéger l’environnement, d’améliorer les écosystèmes aquatiques (zones humides) , d’atténuer les effets des inondations et des sécheresses. La DCE établit un cadre pour une politique globale communautaire dans le domaine de l’eau. La réglementation européenne oblige les Etats membres de prendre des dispositions qui doivent concourir à la protection des ressources en eau douce, ou salée, superficielles ou souterraines, de transition et côtières. Des objectifs louables. Mais jamais la DCE ne réclame et encore moins n’exige la suppression des seuils, des barrages et des étangs.

    Sur les modalités prises par la France, nous avons quelques observations sur les délais, les indicateurs, les diagnostics, les coûts, la rhétorique et une analyse divergente des priorités. C’est tout.

    En 2011, nous estimions que l’atteinte des objectifs d’une eau de bonne qualité en 2015 était une galéjade. Nous savions tous que l’on ne retrouverait pas la qualité de l’eau de 1960. A défaut de changer les paradigmes, il est plus simple de changer les règles, d’employer des termes édulcorés « on s’efforcera de… », ou de modifier les indicateurs et les normes. Nous n’avons plus les moyens de rêver à des objectifs ambitieux en terme environnemental car la machine s’est emballée depuis 1970. 

    Cette grande suspicion initiale dont nous nous faisons l’écho, est née dès que le diagnostic a été émis : l’oligarchie de l’eau prétendait que dans le domaine de l’hydromorphologie, la destruction des seuils et barrages allait permettre d’atteindre les objectifs fixés par l’UE sur la bonne qualité de l’eau en 2015. Nous avons perdu 10 ans dans une voie peu probante.

    Effets induits

    Les finances publiques, censées être utilisées à bon escient, voire faire des économies au lieu de jeter l’argent par centaines de millions d’euros dans les rivières au titre de la continuité écologique, se trouvent lourdement mises à contribution sans aucune garantie de résultat. Cette très forte mobilisation de fonds publics au service du dogme de l’hydromorphologie, les Agences de l’eau tentent en 2013 de la justifier par un large soutien démocratique. Peine perdue: le meilleur score de réponse aux questionnaires orientés atteint très péniblement 0,05 %.

    Les résultats 

    Même avec des indicateurs très édulcorés, même avec des mesures extrêmement complaisantes, c’est un échec total. Il s’agissait bien d’une chimère. Nous ne nous réjouissons pas de cette défaillance. Il serait encore temps de rectifier le tir : dans l’eau claire il y a des pesticides, des nitrates, du phosphore, des perturbateurs endocriniens, du pyralène et autres métaux lourds. Nous estimons que ces facteurs dégradent gravement la qualité de l’eau, déciment bien plus les populations piscicoles que des seuils, barrages et étangs qui existent pour certains depuis des siècles.

    Le dogme sur le terrain

    Après le branle-bas de combat de tous les services en charge de l’eau qui ont martelé et vulgarisé que l’hydromorphologie et  l’arasement des seuils constituaient l’unique solution pour recouvrer une eau de qualité sans qu’aucune étude scientifique sérieuse n’ait formellement incriminé ce facteur, ces services se heurtent sur le terrain quelquefois à des contentieux…mais toujours à des incompréhensions et à une grande inertie.

    Si l’ONEMA se charge de vanter les « retours d’expériences », aucun service n’a vocation et ne se lance dans la compilation des contentieux, pétitions, manifestations, articles de presse etc…Pourtant, à chaque coin de l’hexagone, ce sont toujours les mêmes analyses, les mêmes propos, la même expression démocratique dont il n’est absolument pas tenu au compte.

    Et aujourd’hui 1er janvier 2014, tous les ouvrages doivent être en conformité au titre du débit réservé. Demain, le 02/01/2014, l’ONEMA devrait dresser 30, 40 ou 50 000 PV. A commencer, ce serait logique, par tous les seuils, barrages et étangs en infraction appartenant aux collectivités territoriales.

    L’ambiance nationale

    il semblerait que la température ait changé en 2013. L’Administration, coincée entre les rapportages de la France mal notés par l’UE qui n’est pas dupe, sanctionnée par les lourdes amendes qui pleuvent et  constatant que la restauration de la monarchie écologique physique des cours d’eau ne modifie qu’à la marge la qualité des masses d’eau, semble en recherche d’angles pertinents.

    Quoi qu’il en soit, la DEB devrait être moins stressée. Elle devrait pouvoir disposer de 13 ans de plus ?

    rapport PDF :  IERPE_Memorandum_politique_europeenne_de_l_eau_L 

    2014-01-02_203643

    Comment imaginer qu’il en fût autrement?  Il fallait bien reporter les échéances! 

    Tous les discours convaincus de ceux qui s’acharnaient avec exaltation uniquement sur les étangs et seuils de moulins au titre de la DCE deviennent dérisoires. Ces atermoiements décrédibilisent les diagnostics et les échéanciers initiaux. 

    Mais cette fois, la prudence commence à s’installer: au lieu de 2021, l’UE va viser plus prudemment 2027…puis… 2060?

    Puisse 2014 permettre de trouver des règles comprises et acceptées par tous ? Et si les échéances sont reportées aux calendes grecques pour la France, les usagers de l’eau ne pourraient-ils pas bénéficier d’un moratoire?